Non, les masques n’empêchent pas l’oxygène de passer
Alors que le couvre-visage est plus que jamais recommandé, le débat sur le fait qu’il nuirait à la respiration refait surface. Le Détecteur de rumeurs s’est demandé ce qu’en disaient des études réalisées auprès de travailleurs et même de sportifs.
L’origine de la croyance
Des habitants de la Floride, un État américain qui bat ces jours-ci des records de nouveaux cas de COVID-19, ont récemment exprimé leur mécontentement quant à un éventuel port obligatoire du masque dans les espaces publics où la distanciation physique est difficile. Là-bas comme au Québec, certains laissent entendre que le masque poserait rien de moins qu’un grave risque pour la santé « en diminuant le taux d’oxygène dans son sang » et en l’exposant « à des niveaux excessifs de dioxyde de carbone ». Certaines parlent même d’hypoxie cérébrale et d’hypercapnie, soit une augmentation de la pression partielle en CO2 dans le sang. La croyance avait également circulé sous d’autres formes en mai dernier et a été déboulonnée en plusieurs langues. Des mèmes circulent aussi, qui ont fait sursauter ceux qui sont habitués de porter des masques à longueur d’année.
Les faits
Il existe en effet de nombreux travailleurs forcés depuis longtemps de porter un masque procédural (N95, P100...) dans l’exercice de leurs fonctions, surtout dans les milieux de la santé et de la construction. Ces travailleurs ont de ce fait été l’objet, au fil des décennies, de nombreuses études scientifiques révisées par les pairs. Aucune ne fait mention d’hypoxie liée au port du masque. Aucune n’évoque non plus un taux de décès plus élevé chez ces travailleurs.
Une revue de la littérature publiée en 2016 s’est intéressée aux diverses mesures physiologiques susceptibles d’être influencées par le port d’un masque de protection respiratoire. La fréquence cardiaque, l’un des paramètres les plus étudiés, semble peu augmenter dans les différentes études. Cela signifie que le cœur d’un individu masqué n’a pas eu à fournir un effort supplémentaire pour approvisionner l’organisme en sang oxygéné.
Dans une petite étude publiée en 2013, 20 participants dans la vingtaine ont dû fournir un effort modéré d’une heure sur tapis roulant (5,6 km/h). Les chercheurs ont conclu que le port d’un N95, peu importe son type (avec ou sans valve), a eu un effet minime sur la fréquence cardiaque et la fréquence respiratoire par rapport à une situation sans masque. Les auteurs ajoutent que ces faibles augmentations sont généralement bien tolérées par les personnes en bonne santé.
Même si les études ne sont pas allées jusque-là, on peut présumer que la différence avec un masque artisanal serait négligeable, si différence il y avait. Parce que l’élément essentiel à retenir, c’est que le masque n’empêche pas l’air de passer. Une molécule d’oxygène est suffisamment petite pour passer entre les mailles du filet : le but du masque est d’arrêter les gouttelettes qui peuvent contenir des virus — et qui, à l’échelle microscopique, sont beaucoup plus grosses qu’une molécule d’oxygène ou de CO2.
En réaction aux nombreux messages qu’ils ont vu passer sur les médias sociaux, certains ont fait le test. En Caroline du Sud, la Dre Megan Hall a diffusé le 23 juin des photos d’elle-même avec quatre différents types de masques et un appareil de mesure du niveau d’oxygène dans le sang et du rythme cardiaque (un oxymètre ou saturomètre, petit appareil qui se place au bout du doigt). Les mesures sont, dit-elle, pratiquement identiques, entre 98 et 99 % (un niveau normal d’oxygène dans le sang est traditionnellement estimé entre 95 et 100 %). « Gardez en mémoire, ajoute la Dre Hall qu’avant ceci j’avais porté le masque chirurgical pendant cinq heures ».
Au Québec, le Dr Alain Vadeboncoeur a raconté une expérience similaire dans un billet publié le 7 juillet. Sans masque, avec masque, avec visière, son taux d’oxygène est toujours demeuré entre 98 et 99 %.
Verdict
La molécule d’oxygène passe entre les mailles du filet.
Source : Maxime Bilodeau – Le Détecteur de rumeurs
Agence Science-Presse (www.sciencepresse.qc.ca)
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