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Le port du masque ne protège pas contre les virus ? Faux

durée 18 août 2020 | 04h00

Au Québec comme aux États-Unis, plusieurs de ceux qui manifestent contre l’obligation de porter le couvre-visage ont soutenu que, vérification faite, toutes les études rigoureuses auraient démontré que le port du masque était totalement inefficace contre les virus. Le Détecteur de rumeurs a vérifié : l’affirmation est fausse et repose sur un survol tronqué des recherches.

 

L’origine de la rumeur

Plusieurs articles et vidéos qui circulent sur le web soutiennent que les études rigoureuses, avec des groupes témoins, et publiées dans des revues révisées par les pairs, démontreraient toutes l’inefficacité des masques faciaux.

Au Canada, c’est le physicien Denis Rancourt, autrefois de l’Université d’Ottawa (dont il a été congédié) qui affirme avoir fait la première revue exhaustive de la littérature médicale. Son rapport, publié dans ResearchGate (un site de partage d’écrits scientifiques, mais qui ne fait l’objet d’aucune révision par les pairs) porte sur sept études menées entre 2009 et 2020, qui ont évalué l’efficacité des masques pour protéger les travailleurs de la santé contre l’influenza et les rhumes.

Selon lui, elles seraient « toutes » arrivées à la conclusion que le port du masque facial (qu’il s’agisse du simple masque procédural ou d’un masque beaucoup plus étanche de type N95) ne protégeait « pas du tout » les travailleurs (et le reste de la population) contre ces infections virales. Outre le fait qu’il a été très sélectif dans son choix d’études, certaines de celles retenues avaient des conclusions moins catégoriques que ce qu’il prétend. Il reste que c’est en partie sur la foi d’études comme celles-ci que l’OMS et les responsables de la santé publique de nombreux pays ont longtemps hésité à recommander le masque facial… une hésitation qui a d’ailleurs alimenté une certaine confusion sur la pertinence de cette mesure.

 

Des études qui portent sur d’autres virus

En fait, les études citées portent toutes sur l’influenza et les rhinovirus, des particules virales beaucoup plus petites que le virus de la Covid-19, plus susceptibles de demeurer longtemps en suspension dans l’air ambiant, et d’emprunter d’autres voies de contagion, comme les yeux.

Parmi les études rapportées, une seule mentionne les coronavirus, et conclut dans ce cas qu’« une méta-analyse démontre l’effet protecteur des masques et des respirateurs contre le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS). » L’effet semble alors très marqué : le risque aurait été réduit de 87 %. Du reste, l’avis scientifique préparé dès 2007 par l’Institut national de santé publique du Québec sur le port du masque soulignait déjà, sur la foi d’une étude menée à Toronto, l’efficacité de cette mesure pour le SRAS.

 

Des études qui portent sur des groupes particuliers

En outre, toutes les études en question portent sur les travailleurs du milieu hospitalier (une seule a aussi étudié la transmission au domicile des malades). II s’agit de milieux peu aérés, où les patients malades, eux, ne portent pas de masques. Résultat : l’air ambiant dans leur chambre sera fortement contaminé. Si le personnel soignant passe plusieurs heures dans un tel milieu, et que leurs masques ne sont pas parfaitement ajustés, des aérosols transportant une forte charge virale pourront s’infiltrer par le contour du nez ou les plis de la peau. Cette situation n’a alors rien à voir avec le niveau de protection apporté par les masques dans les endroits publics, où la charge virale ambiante est beaucoup plus faible.

 

Les virus sont trop petits pour être bloqués par les masques ? Faux

De fait, en dehors des milieux hospitaliers, de nombreuses expériences en vidéo ont clairement montré l’efficacité des couvre-visages pour diminuer jusqu’à 95 % des émissions de microgouttelettes.

Les opposants au masque soutiennent que le virus est beaucoup plus petit que les mailles des tissus utilisés comme couvre-visages. C’est vrai : le virus de la Covid-19 mesure environ 0,12 micromètres (0,12 millièmes de millimètre) ; un masque conçu avec des mailles aussi fines ne permettrait pas de respirer correctement. Mais cette grosseur des mailles n’a pas beaucoup d’importance, car les fibres du masque réduisent la vitesse de l’air expiré et les particules sont alors piégées par ce qu’on appelle l’effet électrostatique. « Par effet des forces intermoléculaires, lorsqu’une très petite particule telle que le SARS-CoV-2 rencontre une fibre, elle s’y colle définitivement. La multitude de fibres non tissées multiplie les chances de collisions et donc, l’efficacité du filtre », expliquait le physicien Jean-Michel Courty, dans un article du quotidien Le Monde.

Dès lors, si le port du couvre-visage dans les lieux publics se généralise, la charge virale en suspension dans l’air y demeurera relativement faible… et les porteurs de masques auront à leur tour très peu de chances d’être contaminés par une dose suffisante.

Par ailleurs, avec la Covid-19, plusieurs nouvelles études ont été menées, et le verdict scientifique confirme désormais l’efficacité du couvre-visage. Il s’agit parfois d’études populationnelles comme celles qu’on a faites en Chine, en Allemagne ou dans divers États américains, mais aussi d’études systématiques avec groupes témoins. Le site ScienceDirect a publié une méta-analyse de 21 études de ce type, où les auteurs concluent que le port du couvre-visage réduirait de 80 % le risque d’infection chez les travailleurs de la santé, et de 47 % dans la population.

 

Source : Pierre Sormany – Le Détecteur de rumeurs

Agence Science-Presse (www.sciencepresse.qc.ca)

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